On compte par dizaines de milliers les barrages, biefs, buses et autres seuils maçonnés faisant obstacle à l'écoulement naturel des cours d'eau français. Les inventaires dressés par les Directions départementales des territoires (DDT) en vue de faire appliquer la loi sur la continuité écologique laissent pantois.
Le réseau hydrographique du seul Puy-de-Dôme en recense plus de 2.000 !
Dont 525 à supprimer ou aménager d'ici 2017 ou 2018 ( voir encadré).
Pourquoi tant d'ouvrages visés ? D'abord pour la préservation des espèces. La reproduction et les échanges génétiques sont menacés par les obstacles. Idem pour les migrations. La fragmentation des cours d'eau limite aussi la recolonisation après les perturbations accidentelles.
Les ouvrages peuvent enfin faire obstacles au transit naturel des sédiments. Parmi les conséquences : relèvement des fonds et perturbation des frayères en amont ; érosion du lit et appauvrissement des fonds en aval…
Qu'imposent les textes ? Pour chaque bassin, les préfets ont donc fait dresser une liste de cours d'eau « classés », où tout ouvrage doit être « géré, entretenu et équipé pour assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs ». La mise en conformité doit être effectuée dans les cinq ans.
Casse-tête. En pratique ? L'affaire est épineuse.
D'abord parce qu'il n'est pas toujours facile de trouver et de mobiliser les propriétaires d'ouvrages qui ne sont plus utiles ou utilisés. « Le propriétaire peut être différent en rive droite et rive gauche ; et celui de la prise d'eau se trouver 100 m plus haut ! », explique Frédéric Lasciouve, chargé d'opérations à la DDT 63. Il peut aussi exister de multiples propriétaires pour un seul obstacle. « On a eu le cas sur la Veyre. Quatre moulins en série, dont un racheté par trois personnes : cela fait sept propriétaires pour une prise d'eau ! »
Patrimoine. Les seuils ou gués anciens peuvent aussi constituer un patrimoine paysager ou local auquel les populations sont attachées : écoulements dans les villages, effets « cascade », etc. Il faut donc trouver des solutions d'aménagement concerté ou d'effacement partiel.
Très, très cher ! Reste que la mise aux normes a un coût : parfois plusieurs dizaines de milliers d'euros !
C'est beaucoup d'argent quand les propriétaires n'ont pas un centime à y gagner. « Ces obligations mettent en péril un patrimoine que nous sommes les premiers à entretenir dans un esprit de préservation de l'environnement… On se trompe de cible », se désespère Michèle Madebène, présidente de l'association des Moulins d'Auvergne.
Il existe heureusement divers accompagnements possibles : Agence de l'eau, Région, Départements, Europe (Feder), fédérations de pêche… 02/03/2015
Anne Bourges
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